Etapes pour bien démarrer

Faire évoluer sa pédagogie pour passer à un modèle de classe inversée peut être intimidant, mais il s’agit simplement, au départ, de vous munir de vidéos ou d’autres ressources pertinentes pour vos élèves et de leur donner comme instructions de les avoir vues avant de venir en classe. C’est le cap le plus important à franchir, et il est relativement simple quand on sait comment s’y prendre. Heureusement, ce site est là pour vous aider. La suite consistera à vous familiariser avec cette nouvelle organisation et à rendre le temps de classe toujours plus riche et motivant pour vous et vos élèves.

Sachez que vous pouvez démarrer progressivement, par exemple en testant ce modèle avec une classe seulement, ou sur une seule leçon. Si l’expérience est concluante, essayez avec d’autres classes, et sur d’autres leçons. De cette façon, vous pouvez vous faire une bonne idée du modèle sans avoir à préparer beaucoup de leçons.

Mais avant tout, assurez-vous que la direction de votre école approuve vos projets. Chacune ayant ses propres règles, notamment concernant l’utilisation d’ordinateurs en classe, ce peut être une bonne occasion pour proposer un débat sur la question, et encourager un emploi intelligent des technologies.

Une fois le feu vert obtenu, voici les étapes à suivre :

1. Choisissez le modèle pédagogique que vous souhaitez mettre en place
2. Munissez-vous de cours que vous pourrez mettre en ligne
3. Mettez votre contenu en ligne
4. Expliquez la démarche à vos élèves
5. Lancez-vous
6. Peaufinez votre méthode

1. Choisissez le modèle pédagogique que vous souhaitez mettre en place

La classe inversée ouvre de nombreuses possibilités quant à la pédagogie à instaurer auprès de ses élèves. Selon vos préférences et selon la politique de votre établissement, vous pouvez par exemple décider d’utiliser la version la plus basique de la classe inversée (c’est-à-dire d’intervertir simplement cours en classe et devoirs à la maison), ou vous pouvez y inclure des notions de pédagogie de projet. De même, vous pouvez choisir de faire progresser votre classe dans le programme de manière groupée (comme dans le modèle classique) ou bien permettre des progressions individuelles où chaque élève peut avancer à son rythme.

Pour voir quelques exemples de concepts pédagogiques intéressants pour votre classe, visitez la section concepts pédagogiques.

2. Munissez-vous de cours que vous pourrez mettre en ligne

De nombreux cours de bonne qualité sont déjà disponibles sur divers sites internet grâce à la générosité de professeurs passionnés (bientôt disponibles dans la section outils et ressources). Cette tendance au partage s’accélère de jour en jour dans le milieu éducatif, et nous n’aurons dans un futur proche que l’embarras du choix quant à ce que nous pourrons recommander à nos élèves. D’ici là, si vous ne trouvez pas votre bonheur dans les ressources existantes, ou si vous préférez faire vos cours vous-mêmes, rassurez-vous, il est devenu très simple et très rapide de confectionner des cours en vidéo. Des applications en ligne ou à télécharger vous permettront de créer des cours où vous pourrez inclure annotations, graphiques, photos, animations, et même du contenu interactif pour proposer des cours encore plus complets et engageants (là encore, voir la section outils et ressources) .

Salman Khan

Salman Khan

L’immense succès des cours en ligne de Salman Khan (khanacademy.org), avec plus de 4000 vidéos postées et 300 millions de vues, a démontré l’efficacité de son modèle. Muni d’une simple tablette graphique et d’un microphone, Khan conçoit des cours très intuitifs et agréables à suivre. On ne voit pas son visage, mais uniquement ce qui apparait sur son écran, et on n’entend que le son de sa voix. On pourrait s’attendre à ce que cette méthode déshumanise la transmission d’information mais c’est curieusement l’inverse qui se produit : on ressent un sentiment de proximité, comme si le professeur était à côté de nous pour nous expliquer son raisonnement. Si vous voulez vous inspirer de cette méthode, je vous invite à regarder cette vidéo sur la révolution française, ou cette introduction sur les équations.

Chacun ayant ses préférences, vous serez peut-être plus à l’aise avec une méthode différente de celle décrite ci-dessus, qui n’est qu’une façon parmi tant d’autres d’obtenir de bons résultats. Je vous encourage donc à en tester plusieurs et prendre celle qui vous convient le mieux. Voici quelques possibilités :

– la méthode “Khan Academy” : aucune webcam n’est utilisée, c’est ce qui se passe sur l’écran qui est enregistré, ainsi que la voix du professeur. Il vous faudra donc un logiciel de “screen recording” (voir section outils et ressources), un microphone, et si possible une tablette graphique (la “Wacom Bamboo” a bonne réputation et se trouve sur internet aux alentours de 50-60€). Il est possible de se passer de tablette, mais si vous souhaitez dessiner sur l’écran, vous serez plus précis qu’avec une souris.

– la méthode “classique” : vous faites votre cours comme si vous étiez en classe, en vous filmant devant un tableau, ou en filmant votre bureau (dans ce cas on ne verra que vos mains et vos documents). Vous pouvez même vous filmer durant une vraie séance de cours, mais assurez-vous que le son soit bien pris. Cette méthode est la plus simple mais elle n’est pas aussi souple que les autres.

– les méthodes hybrides : vous utilisez une combinaison des méthodes ci-dessus. Vous pouvez par exemple vous filmer chez vous à l’aide d’une webcam et montrer ce qui se passe sur votre écran, en alternant de l’un à l’autre, où en montrant les deux en même-temps (une moitié de l’écran montre le “screen recording” et l’autre montre ce que filme votre webcam).

Quel que soit votre choix, le plus important est de faire des cours engageants et ludiques. Profitez donc de l’occasion pour inclure des anecdotes et transmettre votre passion du sujet.

3. Mettez votre contenu en ligne

Vos élèves doivent pouvoir accéder à vos cours facilement et à tout moment, le plus pratique est donc de mettre vos cours en ligne sur un site tel que Youtube, Vimeo, ou Screencast.com. Si vous ne souhaitez pas mettre ces cours à libre disposition  du public, vous pouvez les mettre en mode “privé” (seul ceux qui ont le lien des vidéos pourront les voir), ou utiliser un site qui permet le partage de contenu avec mot de passe. Vous avez aussi l’option de mettre vos vidéos en podcast (sur iTunes par exemple), ce qui aura pour effet de télécharger automatiquement vos cours sur les ordinateurs de vos élèves, qui pourront alors les visionner même lorsqu’ils n’ont pas accès à internet.

Vous pouvez aussi créer votre site perso très facilement grâce à un outil tel que weebly. A titre d’exemple, il m’a fallu moins d’une heure pour réaliser ce petit site, joli et pratique.

Pour les élèves qui n’auraient pas d’accès internet chez eux, vous pouvez leur transmettre vos cours via une clé USB ou un DVD. En dernier recours, si vous avez des ordinateurs dans votre salle (ou si certains élèves en apportent), ils pourront être utilisés par ceux qui en ont besoin pour le visionnement de cours durant le temps de classe.

Pour plus d’informations, à nouveau, voir la section outils et ressources.

4. Expliquez la démarche à vos élèves

Le professeur prend un rôle de coach et de tuteur dans une classe inversée

Le professeur devient un coach et un tuteur

Il est important que vos élèves comprennent leur propre intérêt dans cette expérience. Une fois qu’ils sauront que vous leur donnez plus d’autonomie et de liberté, vous pourrez avancer sur de bonnes bases. Expliquez-leur ce que vous attendez d’eux : vous leur redonnez le contrôle de leur apprentissage, en échange de quoi ils doivent jouer le jeu en regardant bien les vidéos au préalable. S’ils coopèrent, la classe sera plus vivante et plus agréable pour tout le monde, et vous garderez ce modèle à l’avenir.

Il y a beaucoup de choses intéressantes à faire lors de cette étape. Vous pouvez par exemple leur proposer un débat de groupe pour décider de certaines règles qu’ils devront suivre par la suite, ce qui aura pour effet de les impliquer positivement dans la démarche.

Une règle qui peut être judicieuse à instaurer est de leur demander de prendre des notes quand ils regardent les vidéos. La prise de note les forcera à suivre activement plutôt que de regarder sans y prêter attention, et ils gagneront du temps quand ils devront revenir sur un point. C’est aussi l’occasion pour eux de noter des questions qu’ils pourront vous poser une fois en classe. De plus, cela vous permettra de voir qui est impliqué et qui ne l’est pas. A vous de voir comment vous voulez gérer ceux qui viennent sans avoir vu le cours, mais il semble préférable de les laisser voir les vidéos en classe (si des ordinateurs sont disponibles). Chaque moment qu’ils passeront à regarder les cours en classe sera du temps où ils ne pourront pas profiter de votre aide ou de celle de leurs camarades, et ils se rendront compte qu’il est plus efficace de venir préparé.

Pour d’autres idées à mettre en place, voir la section conseils et idées.

5. Lancez-vous

Votre premier jour de classe inversée sera une expérience inédite pour vous et vos élèves. N’essayez pas de leur faire croire que vous savez exactement comment les choses vont se dérouler. Au contraire, soyez transparent et expliquez que c’est un essai mais que ce n’est pas une raison pour faire n’importe quoi. Les professeurs sont souvent surpris du niveau de maturité dont font preuve leurs élèves quand ils reçoivent de la confiance. Donnez-leur l’occasion de montrer qu’ils peuvent être responsables.

Elèves formant un groupe de travail en classe

Un groupe de travail en pleine réflexion

Cette nouvelle organisation vous permettra de suivre les progrès de chaque élève, il peut donc être utile de préparer un document où vous pourrez noter les avancées et les lacunes de chacun. Vous serez alors plus en mesure d’aider ceux qui en ont besoin et vous pourrez faire des petits groupes d’élèves par niveau pour faire des interventions ciblées. Parallèlement, vous pourrez faire des groupes dans lesquels des élèves ayant saisi un concept aideront des élèves l’ayant mal compris.

Si vous ne voyez pas trop comment organiser votre classe ou comment occuper vos élèves, sachez qu’il y a une infinité de possibilités et que vous modifierez probablement votre façon de faire au fur et à mesure.

L’activité la plus basique est bien sûr de faire en classe des exercices correspondants au sujet du jour. C’est un bon moyen de commencer tout en gardant vos repères. Vous pouvez ensuite rendre la classe plus vivante, en permettant aux élèves de discuter entre eux, d’aller voir ce que font les uns et les autres pour s’entraider. Votre salle prendra des allures de “salle de révisions”, mais c’est une bonne chose, tant que tout le monde avance à un bon rythme : une classe peut être à la fois décontractée et très productive.

6. Peaufinez votre méthode

Par la suite, vous pourrez passer à des activités plus pratiques. En fonction de la matière que vous enseignez, vous pourrez proposez des débats, des jeux de rôles, des applications concrètes (ateliers, présentations, expériences), des enigmes et des problèmes qui mettront en jeu des concepts récemment appris, ou qui serviront d’introduction à de nouveaux concepts, etc. Vos vidéos de cours pourront être remplacées ou accompagnées par des documents servant à poser des questions, générer des conversations, ou encore donner des instructions pour un projet.

élève travaillant sur un atelier de menuiserie pour un projet de classe inversée

Une nouvelle vocation ?

Attendez-vous à passer par une période de transition où vos élèves devront désapprendre à suivre passivement un cours, et où vous-même apprendrez à prendre vos marques. Puis, quand vous classe se sera habituée à ce modèle, et que certains élèves prendront de l’avance sur d’autres, il sera peut-être temps d’assouplir votre organisation pour permettre à chacun d’avancer réellement à son rythme. Vos élèves progresseront individuellement (ou en groupes s’ils le désirent), en suivant un programme qui n’est pas figé dans le temps à l’avance. Bien sûr il faudra s’assurer que personne ne reste à la traine, c’est là que votre nouveau rôle de tuteur prendra toute son importance.

En conclusionN’hésitez pas à expérimenter, mais gardez toujours en tête que le but est de donner envie à vos élèves et de les rendre actifs. Soyez créatifs, parcourez le site pour vous inspirer, renseignez-vous sur la pédagogie de projet pour trouver des activités intéressantes, et partagez vos idées sur le forum !

(sources photos : Khan Academy, 2, 3, 4)